« marotte. voilà un laquais, qui demande si vous êtes au logis, et dit que son maître vous veut venir voir.
madelon. apprenez, sotte, à vous énoncer moins vulgairement. dites : «voilà un nécessaire qui demande si vous êtes en commodité d’être visibles.» marotte. dame, je n’entends point le latin, et je n’ai pas appris, comme vous, la filofie dans le grand cyre.
madelon. l’impertinente ! le moyen de souffrir cela ! et qui est-il, le maître de ce laquais ? marotte. il me l’a nommé le marquis de mascarille. madelon. ah ma chère ! un marquis, oui, allez dire qu’on nous peut voir. c’est sans doute un bel esprit, qui aura ouï parler de nous. » les précieuses ridicules sont la première comédie imprimée de molière, mais le texte publié n’est que l’image silencieuse de ce qui fit en 1659 son succès immédiat : un théâtre vivant et neuf, car cette courte pièce en un acte et en prose affichait son parti pris en faveur du spectaculaire, du jeu des acteurs, de ce qu’on voit et qu’on entend, de ce que l’écrit justement ne transmet pas. sa nouveauté prit à rebours les idées reçues sur la comédie : spectateurs conquis et rivaux dépassés surent alors que plus rien ne serait comme avant sur les scènes parisiennes du xviie siècle.
introduction, notes et commentaires par claude bourqui.
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